POUROUGEPOULE

Le pou rouge trouve la poule presque par hasard.

Retour à la liste des connaissances

Comment les (micro)prédateurs trouvent-ils leur proie ?

Comme ils vivent à distance de leur source de nourriture, les prédateurs et les microprédateurs doivent rechercher une proie ou « hôte » pour réaliser chaque repas. Pour ce faire, la plupart utilisent leurs sens pour la localiser de plus ou moins loin : le loup (prédateur) et le moustique (microprédateur) utilisent à la fois la vue et l'odorat pour diriger leur trajet vers le repas, la chauve-souris utilise l'ouïe (elle produit des ultrasons et localise sa proie en fonction de l'échos renvoyé). Le moustique et les autres microprédateurs (punaise de lit, sangsue, pou rouge) utilisent aussi leur capacité à percevoir finement les variations de température. La perception des vibrations produites par un hôte potentiel déclenche l'émergence des puces adultes (qui "sortent" des nymphes et se mettent immédiatement en quête d'un repas de sang).

Comment le pou rouge trouve-t-il la poule ?

Le pou rouge n'a pas d'yeux mais il est capable de détecter des odeurs, le CO2, des variations de température et des vibrations. La perception de l'odeur, du CO2 et de la chaleur émise par les poules stimule l'activité de recherche d'hôte chez le pou rouge. Cependant, il ne semble pas utiliser ces sens pour orienter à proprement parler son trajet vers une poule à distance : le trajet d'un acarien affamé en présence de ces indices de présence de poule semble essentiellement aléatoire à l'échelle de mètres. Le pou rouge n'est détourné vers l'odeur de poule que très localement (quelques centimètres). On ne sait pas comment ni si le pou rouge utilise les vibrations dans sa prospection pour un repas de sang.

Mais alors, comment le pou rouge trouve-t-il la poule ? Les poux rouges aiment monter : un individu en mouvement grimpe en général sur tout obstacle vertical qu'il rencontre. Les pattes des poules sont les ponts verticaux que les poux rouges empruntent pour atteindre leur repas de sang. Sachant que les poux rouges s'agrègent typiquement là où la densité de poule est élevée (zones hors sol), il leur suffit de parcourir quelques dizaines de centimètres au départ de leur agrégat pour rencontrer par hasard la patte d'une poule. Même s'il risque de faire un détour inutile sur un montant quelconque avant d'y parvenir, le pou rouge n'a finalement pas besoin de s'orienter avec une grande précision pour se nourrir dans un élevage !

En savoir plus

Comment sait-on cela ?

D'une manière générale, la réponse des poux rouges aux différents stimuli émanant de la poule (odeurs, le CO2, des variations de température et des vibrations) a été étudiée grâce à des expérimentations diversifiées, en grande partie au laboratoire, complétées d'expérimentations sur le terrain. Au laboratoire, le comportement d'acariens confrontés à des variations de température, d'odeurs, de concentrations de CO2 et/ou de vibration a été observé et noté de manière standardisées, et les données obtenues ont été analysées statistiquement. Ces observations ont été réalisées sur des centaines d'acariens en jeûne ou fraîchement gorgés de sang dans des conditions contrôlées, avec des instruments optiques et/ou électroniques. Sur le terrain, c'est par l'usage de pièges spécifiques et le comptage des acariens piégés selon les différentes modalités testées que la réponse aux stimuli a été étudiée. Les tests en laboratoire permettent de caractériser les comportements typiques face à des facteurs maîtrisés. Les piégeages sur le terrain permettent de déterminer dans quelle mesure ces comportements sont réalisés en condition d'élevage, en présence de facteurs multiples (maîtrisés et non maîtrisés).

En ce qui concerne les odeurs, il a fallu d'abord caractériser celles que produit la poule. Une odeur est un ensemble de molécules volatiles perçu par un système chimiosensoriel. La composition de l'odeur des poules a été caractérisée par des analyses chimiques (par Chromatographie en phase gazeuse-spectrométrie de masse, GC-MS) et un parfum de poule artificiel a été breveté. Des tests de comportement à différentes échelles spatio-temporelles ont été réalisés en laboratoire : tests de choix entre différents flux d'air ou analyse du trajet parcouru autour de la source d'odeur in vitro (quelques cm2 durant 10 minutes par acarien), comptage des acariens capturés par des pièges électriques appâtés ou non par une odeur de poule (sur une surface d'un m2 au laboratoire et sur des bâtiments de pondeuses complets). Dans les tests de choix, on évalue l'attractivité à courte distance en comparant le choix immédiat de centaines d'acariens entre deux odeurs (odeur de poule et air pur par exemple). Dans les analyses de trajet, on enregistre au moyen d'une caméra pilotée par un nanoordinateur le trajet individuel en 2D de centaines d'acariens confrontés ou non à une odeur dans une arène de 4 cm de diamètre. Dans les expérimentations avec pièges électriques, des tubes verticaux miment les pattes de poule et sont coiffés d'un système électrifié relarguant l'odeur testée. Le système électrifié projette tout acarien cherchant à atteindre l'odeur sur une plaque engluée standard, sur laquelle sont comptés les acariens piégés dans l'intervalle de l'expérimentation (1h ou 1 nuit). C'est en confrontant les pourcentages de choix in vitro entre différentes odeurs et de l'air pur, les caractéristiques des trajets parcourus, les quantités de poux rouges piégés en présence ou en absence d'odeur de poule et/ou d'ammoniac et les distances entre points de lâcher et pièges, que nous avons pu améliorer notre compréhensions du comportement de recherche de nourriture chez le pou rouge.

Sources scientifiques

Retour à la liste des connaissances